Le sentiment d’auto-efficacité, ça vous parle ? Mais connaissez-vous ses effets au niveau professionnel, de l’apprentissage, de la motivation, de la reconversion professionnelle… ?

Quelques rappels :

Identifié par Bandura dans les années 1980, l’auto-efficacité est une croyance en ses capacités à produire un résultat satisfaisant dans un domaine / une activité spécifique.

Par exemple : on peut se sentir capable de construire une cabane, mais pas de générer un tableau croisée dynamique.

⚠️ Attention, ne le confondez pas avec l’estime de soi qui est un jugement global positif / négatif sur soi-même.

1 – Les effets du sentiment d’auto-efficacité élevé sur…

🧠 Traitement de l’information dans le cerveau : augmente la capacité à rester focalisé sur la tâche, favorise l’accès aux connaissances disponibles en mémoire, la recherche / l’analyse des informations en situation complexe et à l’interprétation des données dans un sens privilégiant le passage à l’action.

💪 Motivation : permet une attribution des résultats positifs à soi-même et non à une cause externe incontrôlable et donc pousse à soutenir l’effort et à persévérer pour atteindre le but en favorisant les réajustements en cas d’échec (vu comme un challenge) et conduit à choisir des objectifs plus ambitieux.

🎭 Émotion : atténue l’anxiété dans les situations stressantes et les comportements d’évitement.

2 – Conséquences au niveau…

1 / Travail :

Pour les salariés / chercheurs d’emploi : influence l’orientation professionnelle (ex : je me sens plus à l’aise avec les langues, je vais privilégier les métiers qui y correspondent), augmente la persévérance et le succès dans le domaine choisi et le niveau d’études, raccourcie le temps de recherche d’emploi, permet de trouver un emploi de meilleure qualité et un salaire plus élevé.

Pour les managers : conduit à des objectifs organisationnels plus stimulants, améliore la pensée analytique, accroît la production, focalisation sur les opportunités à saisir avec le risque d’occulter les dangers et les difficultés.

2/ Apprentissage :

Pour les apprenants : à niveau de compétence intellectuelle identique les apprenants avec une auto-efficacité élevée obtiennent de meilleures performances, le niveau d’auto-efficacité prédit l’intérêt pour le domaine d’études et le niveau d’études, la mise en application des connaissances acquises, contribue au développement de la motivation intrinsèque.

Pour les formateurs / enseignants : influe sur la recherche de méthodes et d’outils afin d’aider ceux qui sont les plus en difficulté (favorisant le guidage, les activités scolaires et la valorisation), évite la pensée défaitiste (de type « c’est peine perdue pour lui »), moins stressés et énervés par les problèmes de comportement.

3/ Santé

Dans le traitement des phobies : agit sur le sentiment d’incapacité à faire face à l’objet / situation de phobie; les comportements d’évitement qui entretiennent voire accentuent les phobies (ex: la phobie de traverser un pont); l’anxiété anticipée.

La thérapie de la dépression : avec un meilleure contrôle des pensées désespérantes (bon prédicteur de maintien de la guérison).

Les addictions : limite l’entrée dans la consommation de drogues (bon prédicateur avec le soutien des amis et une « activité professionnelle porteuse de sens »), aide à envisager une sortie des conduites addictives (par ex : tenter ou retenter l’arrêt du tabac) et à éviter la reprise pour les anciens consommateurs.

3 – Les sources du sentiment d’auto-efficacité personnelle

 

Comment booster le sentiment d’auto-efficacité des collaborateurs, des stagiaires ou la vôtre…concrètement ?

Les différentes sources d’auto-efficacité sont expliquées dans la vidéo JAE. Je vous propose donc plutôt des exemples d’application concrète.

1 / Expérience de maîtrise personnelle :

Pour accompagner un collaborateur vers un changement (de poste / mission / logiciel…), prenez appui sur ses réussites passées dans les situations similaires surtout si elle n’a pas été facile. Valorisez les capacités dont il/elle a su démontrer et les résultats obtenus grâce à ses efforts.

Dans le cas d’un objectif lointain / difficile / ambitieux, invitez la personne à le découper en sous-objectifs SMART pour expérimenter le succès dans les étapes intermédiaires et renforcer son SEP.

Ex : aujourd’hui, je suis technicien-ne et je veux devenir chef-fe de projet. De quoi ai-je besoin pour y parvenir ? Au niveau des compétences, de la formation, de soutien, d’opportunité… Comment puis-je y accéder ?

2/ L’apprentissage social :

Prenons l’exemple d’une mise en situation dans le cadre d’une formation. Il y a un qui joue son rôle de professionnel, l’autre d’un client et le 3e observe. Ici, celui qui met en œuvre les nouvelles pratiques en situation s’exerce et développe son sentiment d’auto-efficacité, mais aussi celui / celle qui observe son collègue. Le fait d’imaginer un collègue réaliser les activités fonctionne aussi, mais dans une moindre mesure.

Mais, pour que cet apprentissage réussisse, le modèle observé doit être similaire à la personne. Par ex : si je débute avec un logiciel, je regarde des personnes qui me ressemble réussir à obtenir les résultats recherchés. Je vais me dire : « si lui / elle y arrive, alors moi aussi ! » Cependant, si je perçois une grande différence, alors je vais me dire : « non, mais elle a des facilités ! » Ou : « ce n’est pas pour moi. C’est pour les jeunes / cadres / créatifs… »

3 / La persuasion sociale :

Que nous soyons managers, formateurs, collègues ou influenceurs motivateurs quand nous entendons : « Je ne crois pas que je vais y arriver. C’est trop dur. » Spontanément, on se précipite pour dire : « Mais non ! Tu vas réussir. Tu as tellement de potentiel. » On peut même pratiquer les auto-encouragements !

Et ça peut très bien marcher auprès des autres, si…

  • Vous avez de la crédibilité auprès de la personne.
  • Elle vous perçoit comme un expert dans le domaine concerné.
  • Elle a confiance en votre fiabilité.
  • Vous le dites avec assurance.

Mais, attention ! Évitez de dire à la personne qu’elle est géniale. C’est un jugement global qui ne passera pas si elle a une estime de soi faible ou souffre de dépression. Elle risque de rejeter votre message.

Privilégiez les remarques positives plus spécifiques et concrètes, même si les résultats vous paraissent minimes. Par ex : « tu as augmenté ton chiffre du mois dernier de 1%. Oui, bon. Ce n’est pas grand-chose. Vu le contexte, c’est déjà bien, continu comme ça. D’ailleurs, comment as-tu fais ?… Quelles autres actions pourrais-tu mettre en place ? Et que penses-tu d’aller vers ces clients-là / proposer ce produit ? »

4 / L’état physiologique et émotionnel :

C’est l’une des sources du sentiment d’auto-efficacité. Ex : si en prenant une nouvelle mission, je me sens serein-e. J’aurai tendance à penser que j’y suis à l’aise. Ceci aura plus de chance de me conduire à la réussite.

Mais l’inverse est aussi vrai.

Ce qui peut être problématique pour développer de nouvelles compétences. Alors, méfions-nous des associations négatives…

Lorsqu’une personne associe un état émotionnel aversif, l’anxiété avec une faible performance du comportement demandé, cela peut l’amener à douter de ses compétences personnelles pour accomplir ci comportement et ainsi conduire à l’échec. VS pas d’anxiété / stress. Ex : l’entretien d’embauche, un nouveau poste + stress peut perturber le traitement l’information.

En conclusion :

Qu’on soit manager, formateur / enseignant ou professionnel de la santé, le sentiment d’auto-efficacité est une notion importante qu’il est utile de développer aussi bien auprès des personnes avec qui nous travaillons qu’en nous-même pour contribuer à l’efficacité collective.

Et c’est ce que je m’applique à faire dans le cadre de mes formations aux soft skills et en bilan de compétences pour favoriser le changement réussi et durable.

Et vous aussi avez désormais quelques clés pour créer des conditions propices à l’épanouissement du sentiment d’efficacité personnelle chez les autres et en vous-même. 😉

Sources :

Collins, J. L. (1982, March). Self-efficacy and ability in achievement behavior. Paper presented at the annual meeting of the American Educational Research Association, New York.

Lecomte, J. (2004). Les applications du sentiment d’efficacité personnelle. Savoirs, vol. n°5, 59-90. https://doi.org/10.3917/savo.hs01.0059

Chabrol Cl. & Radu M. (2008). Psychologie de la communication et persuasion. De Boeck Supérieur, 154-155.